COMMENT EXPLIQUER SIMPLEMENT A MON CLIENT D’AMELIORER SA COMPETITIVITE ?
Temps de lecture: 7 min | 03 nov. 2025 à 05:15
Micheline CLAES
Administratrice de l'Ordre des Experts Comptables Et comptables OECCBB SR
Face à cette observation entendue tout récemment (le métier change ma bonne dame !), voilà comment mieux communiquer auprès de vos clients.
1. Cadre normatif et obligations comptables
L’AR du 29 avril 2019 stipule que, pour les sociétés soumises à dépôt des comptes annuels, les comptes annuels doivent donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat.
L’article 3.2 §1er de cet AR précise que les états doivent être établis « avec clarté » et indiquer « la nature et le montant des avoirs et des dettes ainsi que des moyens propres, des obligations et engagements et la nature et le montant des charges et des produits ».
Bien que votre client puisse être dans un régime simplifié (personne physique) ou une petite société non obligée de déposer des comptes complets, ces principes normatifs constituent un référentiel de bonne gouvernance et de fiabilité financière.
Du point de vue de la compétitivité, respecter ce cadre signifie : fiabilité des chiffres, transparence vis-à-vis des partenaires (banque, fournisseurs, clients), anticipation des risques patrimoniaux ou financiers.
⇒ Répétez régulièrement le message à votre client : « Votre comptabilité n’est pas simplement un outil de conformité, c’est une base de pilotage qui, si elle est bien structurée, vous rend plus compétitif. »
Pour améliorer sa compétitivité, une entreprise doit travailler sur plusieurs leviers financiers :
la rentabilité (capacité à générer un résultat suffisant compte tenu des ressources engagées),
la efficience des ressources (optimiser l’utilisation du capital, immobilisations, fonds de roulement),
la structure financière (endettement, fonds propres, liquidité),
la réactivité / adaptation (capacité à analyser, décider, ajuster rapidement),
En partant d’une comptabilité régulière, il est important de passer de la simple lecture comptable à une analyse financière proactive : cash‐flows, capitaux engagés, retour sur capital employé (ROCE), gestion du besoin en fonds de roulement (BFR) sont des notions clés. => En bref : la compétitivité ne passe pas uniquement par la baisse des prix mais par une gestion financière rigoureuse permettant d’être plus réactif, plus solide, plus crédible.
3. Les soldes intermédiaires de gestion (SIG) comme outil de pilotage
Les SIG sont des indicateurs construits à partir du compte de résultat qui permettent d’analyser l’activité selon des étapes intermédiaires : marge brute, marge d’exploitation, résultat courant, etc. Voici comment les utiliser pour la compétitivité :
Calculer la marge brute : chiffre d’affaires – coût des ventes. Permet de vérifier que l’activité génère assez de marge pour couvrir les charges fixes.
Identifier la marge d’exploitation : marge brute – charges d’exploitation (hors charges financières). Montre la performance « cœur de métier ».
Analyser le résultat d’exploitation puis le résultat courant avant impôts puis le résultat net.
Exprimer ces soldes en pourcentage du chiffre d’affaires pour comparer dans le temps ou avec des références sectorielles.
Par exemple, si la marge brute ou la marge d’exploitation diminue, c’est un signal de perte de compétitivité : coût des matières ou achats trop élevés, productivité insuffisante, prix non ajustés, etc.
⇒ Message à votre client : « Nous allons mettre en place des indicateurs SIG adaptés à votre activité, afin d’identifier les leviers de marge, de coût et de structure qui vous permettront d’être plus compétitif. »
4. Relier le cadre normatif + la gestion + la compétitivité
Voici comment l’ensemble se combine :
Le cadre normatif (AR/CSA) impose des états fiables. Cela crée de la crédibilité auprès des partenaires.
Une comptabilité bien tenue fournit les données pour calculer des SIG et autres ratios financiers (inspirés de Vernimmen).
Ces indicateurs permettent d’analyser et d’agir : par exemple :
si le BFR est élevé, cela immobilise des ressources, réduit la trésorerie, affaiblit votre réactivité. La gestion du BFR (Besoin en fonds de roulement) est essentielle.
si le retour sur capital employé (ROCE) est faible, cela veut dire que les ressources engagées ne génèrent pas suffisamment de valeur.
Ce que mesure le ROCE
Ce que cela signifie pour la compétitivité
La performance opérationnelle
L’entreprise gagne-t-elle vraiment de l’argent avec son activité ?
L’efficacité dans l’utilisation des capitaux
Chaque euro investi est-il bien utilisé ?
La discipline d’investissement
Machines, stocks et ressources ne dorment pas inutilement
La création de valeur
Le ROCE est-il supérieur au coût du capital ? (logique centrale chez Vernimmen)
Interprétation du ROCE
ROCE > coût du capital⇒création de valeur
ROCE ≈ coût du capital⇒stagnation, risque stratégique
ROCE < coût du capital⇒destruction de valeur (l’entreprise s’appauvrit en investissant)
Pour l’entreprise, c’est l’indicateur clé pour juger si un business model est durable et créateur de valeur.
Pourquoi c’est un indicateur stratégique ?
Le ROCE relie rentabilité + structure financière + performance opérationnelle.
Il oblige l’entreprise à agir sur deux leviers simultanés :
Levier
Effet sur le ROCE
Améliorer l’EBIT
Optimiser la marge, revoir les prix, réduire les coûts
Réduire le capital employé
Baisser le BFR, réduire les stocks, accélérer les encaissements
Si la structure de financement est déséquilibrée, le coût financier monte, ce qui pèse sur votre compétitivité (charges financières, rigidité).
L’expert-comptable – votre conseiller de confiance – va vous aider à identifier ces différents facteurs et ENSEMBLE, nous allons pouvoir prendre des actions concrètes : réduire les stocks, négocier des délais clients/fournisseurs, optimiser les immobilisations, ajuster les prix, automatiser certains processus, etc. Ces actions renforcent votre compétitivité.
5. Proposition d’action pour votre client
Voici un plan d’action que vous pouvez proposer au client :
Étape 1 : Diagnostic initial
Vérifier que les états comptables respectent les principes de l’AR : image fidèle, clarté, cohérence.
Établir un tableau de bord SIG pour les 2 à 3 derniers exercices (marge brute, marge d’exploitation, résultat courant, etc.).
Calculer quelques ratios Vernimmen‐inspirés : ROCE, ratio BFR/CA, ratio endettement, ratio frais financiers/CA.
Pour chaque faiblesse, proposer des actions : par ex. renégocier fournisseurs, automatiser facturation, améliorer suivi clients, réduire immobilisations inutiles.
Étape 3 : Mise en place d’un suivi périodique
Mettre à jour régulièrement les SIG (mensuel, trimestriel ou semestriel).
Suivre l’évolution des ratios clés (ROCE, BFR, etc.).
Rapporter à la direction/client les actions et leur impact financier (gain marge, réduction coûts, libération trésorerie).
Faire de la finance non seulement un outil de contrôle mais de pilotage : prévoir les investissements selon le retour attendu ; évaluer la valeur créée.
Utiliser la comptabilité comme support de décisions commerciales : lesquelles activités sont les plus rentables ? lesquelles sont plus risquées ?
Communiquer aux partenaires (banques, clients, fournisseurs) une structure financière saine – facteur concurrentiel.
6. Message final pour le client
« En conclusion, la compétitivité ne se construit pas uniquement par le marketing ou par la baisse des prix. Elle repose sur une gestion financière structurée, fiable et proactive. En respectant les principes de l’AR du 29 avril 2019, en utilisant les indicateurs de gestion tels que les SIG, et en adoptant les bonnes pratiques de pilotage analysées ensemble, vous vous dotez d’un avantage durable : meilleure maîtrise de vos ressources, flexibilité accrue, crédibilité renforcée.
Je vous propose donc que nous travaillions ensemble sur ce plan d’action afin que votre entreprise devienne non seulement plus solide mais plus compétitive sur son marché. »