
Le budget mobilité, instauré en 2019 comme alternative volontaire à la voiture de société, s’apprête à entrer dans une nouvelle phase de son évolution législative. Initialement prévu comme obligatoire dès le 1er janvier 2026 pour tous les employeurs mettant des voitures de société à disposition, son entrée en vigueur sera finalement reportée — au plus tôt à juillet 2026 — en raison de difficultés techniques et fiscales identifiées par le gouvernement et les fédérations sectorielles.
Cette actualité prend une dimension particulière : le gouvernement fédéral examinera ce vendredi un avant-projet de loi visant à réformer profondément le budget mobilité, avant même d’en rendre l’octroi obligatoire. Pour les experts-comptables, cette séquence soulève des enjeux concrets : compréhension de la réforme, gestion RH des clients, anticipation des effets fiscaux et sociaux.
Le report annoncé par Renta découle de deux constats majeurs.
L’intégration du budget mobilité dans les packages de rémunération constitue un chantier complexe pour les employeurs. Le dispositif touche à la fiscalité, à la sécurité sociale et à la gestion opérationnelle des ressources humaines.
À titre d’illustration, un employeur qui offre une voiture de société doit être en mesure d’expliquer, calculer et suivre une alternative dotée d’un régime fiscal spécifique — tout en tenant compte des contraintes légales actuelles.
Aujourd’hui, le budget mobilité peut financer le loyer ou le crédit hypothécaire du travailleur, sous conditions.
Selon Renta, les règles de contrôle sont si limitées qu’une large part des budgets est convertie en quasi-salaire net, sans cotisations sociales ni impôts.
Ce point sera au cœur de la révision débattue au Conseil des ministres ce vendredi.
Le gouvernement souhaite transformer le budget mobilité en un droit automatique, mais plusieurs questions structurantes doivent encore être tranchées.
Certaines fonctions nécessitent objectivement un véhicule mis à disposition (p. ex. commerciaux itinérants). Le texte devra préciser si un employeur peut limiter l’accès au budget mobilité pour des raisons organisationnelles.
La question d’une exemption, totale ou partielle, reste controversée.
Doit-on fixer un seuil d’effectifs ? Créer une phase transitoire ? Étendre le délai d’adaptation à plus d’un an ?
Les arbitrages seront déterminants pour la charge administrative réelle des petites entreprises.
Actuellement, l’obligation ne s’appliquerait qu’aux employeurs ayant mis une voiture de société à disposition pendant au moins 36 mois.
Supprimer cette règle reviendrait à transformer le budget mobilité en un droit immédiat dès l’accès potentiel à une voiture.
L’avant-projet propose un délai d’un an avant application, mais un phasage différencié en faveur des PME pourrait émerger du débat.
Les fédérations sectorielles estiment que la généralisation du budget mobilité, sans réforme préalable, pourrait coûter plus de 100 millions d’euros par an aux finances fédérales.
Ce calcul repose sur la conversion de budgets mobilité en dépenses de logement intégralement exonérées (fiscalité et cotisations sociales), ce qui diminuerait sensiblement le rendement du système actuel des voitures de société.
Par exemple :
Ce point constitue l’une des raisons du report, mais également un enjeu fiscal majeur pour les discussions de ce vendredi.
La réforme, même reportée, nécessitera une préparation accrue.
Les entreprises devront notamment :
Pour les experts-comptables, ces évolutions impliquent d’accompagner clients et secrétariats sociaux dans la mise en œuvre d’une législation appelée à devenir structurelle dans les politiques RH.
Point analysé | Situation actuelle | Enjeux de la réforme | Points d’attention pour la profession |
|---|---|---|---|
Obligation du budget mobilité | Prévue au 1/1/2026 | Report confirmée – au plus tôt juillet 2026 | Anticiper un nouveau calendrier et informer les employeurs |
Utilisation logement (pilier 2) | Possible sous conditions | Révision attendue pour limiter les abus | Risque de redéfinition fiscale importante |
Exclusions possibles | Non défini | Discussions sur fonctions itinérantes | Clarifier les droits des travailleurs |
PME | Pas d’exemption formelle | Débat ouvert : seuils, phasage | Préparer un accompagnement différencié |
Perte fiscale estimée | Neutralité attendue | Risque de 100 M€ de pertes annuelles | Impact potentiel sur la politique budgétaire fédérale |
Afin d’accompagner efficacement les entreprises dans cette transition, plusieurs actions peuvent être envisagées :
Suivre l’évolution des discussions au Conseil des ministres et les avis du CNT, CCE et Conseil d’État, afin d’informer rapidement les clients.
Identifier les travailleurs concernés, les plans de mobilité existants et les interactions avec les voitures de société.
Documenter les cas où le budget mobilité est principalement utilisé pour le logement, afin d’éviter un risque de requalification lors des contrôles.
Plusieurs scénarios (voiture / budget mobilité / conversion logement) permettent d’objectiver les choix de l’employeur et du travailleur.
Le degré d’information reste faible. Les experts-comptables joueront un rôle essentiel dans la vulgarisation et la structuration du processus.
Le budget mobilité entre dans une phase décisive : report confirmé, réforme imminente, débat fiscal ouvert. Le passage du texte au Conseil des ministres ce vendredi constitue une étape majeure, qui déterminera la cohérence, la faisabilité et le calendrier réel de la réforme.
À l’heure où la mobilité durable devient un pilier des politiques RH, la profession comptable et fiscale a un rôle déterminant : aider les entreprises à naviguer dans un cadre complexe, trouver un équilibre entre attractivité salariale et conformité, et anticiper les impacts budgétaires pour l’employeur comme pour l’État.