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Gestion des fortes chaleurs au travail: obligations légales et bonnes pratiques pour les employeurs

Avec les températures estivales atteignant régulièrement les 30 °C, la question des conditions de travail en période de canicule prend une importance accrue, notamment pour les employeurs du secteur tertiaire. La réglementation belge prévoit un dispositif précis d’évaluation et de réaction, basé non pas sur la température ambiante « classique », mais sur un indice spécifique, le WBGT.

Cet article vise à clarifier les obligations légales, les valeurs seuils à surveiller et les mesures à mettre en place, en tenant compte de la charge physique de travail et des risques spécifiques comme l’exposition à l’ozone pour les activités en extérieur.


1. Comprendre l’indice WBGT : une mesure adaptée aux risques thermiques

Le thermomètre WBGT (Wet Bulb Globe Temperature) est l’outil de référence pour évaluer les risques liés à la chaleur au travail. Contrairement à un thermomètre classique, il tient compte de trois variables combinées :

  • La température de l’air
  • L’humidité ambiante
  • La vitesse de l’air (ventilation naturelle ou artificielle)

Le résultat WBGT est donc souvent inférieur de 5 à 10 °C à la température indiquée sur un thermomètre standard.

Seuils déclencheurs selon l’intensité du travail

Charge physique de travail

Valeur limite WBGT

Légère (bureaux, accueil…)

29

Moyenne (magasin, logistique)

26

Lourde (manutention, nettoyage)

22

Très lourde (chantier, extérieur)

18


2. Mesures obligatoires à prendre par l’employeur

Dès qu’un seuil est dépassé, l’employeur est tenu de mettre en œuvre un plan de protection gradué, qui dépend de la durée et de l’intensité du dépassement.

Obligation en cas de dépassement de seuil WBGT

Délai d’exécution

Protéger les travailleurs du rayonnement solaire direct

Immédiat

Mettre à disposition des boissons rafraîchissantes

Immédiat

Installer une ventilation mécanique adéquate

Dans les 48h

Prévoir des temps de pause ou rotations si le dépassement persiste plus de 48h

Dès le 3e jour

?Exemple : dans une entreprise de production, si l’indice WBGT mesuré dépasse 22 sur deux jours consécutifs, l’employeur devra installer un système de ventilation avant le troisième jour et organiser des pauses supplémentaires si la situation perdure.


3. Gestion des risques liés à l’ozone

Les fortes chaleurs s’accompagnent souvent de concentrations élevées d’ozone, notamment en zone urbaine ou lors de pics de pollution.

Bien que la réglementation du travail ne contienne pas de norme spécifique relative à l’ozone d’origine climatique, ce polluant est considéré comme un risque professionnel lorsqu’il affecte les conditions de travail en extérieur.

Mesures à privilégier pour les postes en plein air :

  • Limiter les activités physiques intenses durant les pics d’ozone (en général entre 14h et 17h)
  • Aménager les horaires de travail (début plus tôt dans la journée)
  • Favoriser le port d’équipements de protection adaptés


4. Responsabilité de l’employeur et droit d’alerte du travailleur

En vertu du Code du bien-être au travail (livre V, titre 1er, relatif aux ambiances thermiques), l’employeur a une obligation générale de prévention des risques physiques liés à l’environnement.

Les travailleurs peuvent saisir le Comité de prévention et de protection au travail (CPPT) ou interpeller le conseiller en prévention/médecin du travail si les mesures tardent à être mises en œuvre.


5. Tableau récapitulatif : obligations liées à la chaleur excessive

Élément à surveiller

Seuil / Référence

Obligation de l’employeur

Température ambiante classique

Indicatif uniquement

Pas de seuil légal en °C

Indice WBGT (mesuré)

18 à 29 selon l’activité

Déclencheur des mesures de protection

Rayonnement solaire direct

Présence

Obligation de protection immédiate

Durée de dépassement (48h)

Oui

Ventilation et temps de repos obligatoires

Taux d’ozone (extérieur)

Aucun seuil légal

Mesures préventives à adapter (organisation du travail)


6. Recommandations pour les experts-comptables et conseillers sociaux

✔️Informer les employeurs de leurs obligations dès que les températures estivales s’installent, notamment dans les secteurs exposés (construction, logistique, horeca, nettoyage…).

✔️Encourager la mise en place d’un protocole interne (plan chaleur) intégrant :

  • les procédures de mesure (accès à un thermomètre WBGT ou équivalent),
  • la chaîne de décision,
  • et les actions graduées à mettre en œuvre.

✔️Vérifier la mise à jour des documents sociaux (règlement de travail, instructions de sécurité, affichages obligatoires).

✔️Prévoir des mesures spécifiques pour les publics vulnérables, y compris les intérimaires, jeunes travailleurs ou femmes enceintes.


En résumé, les épisodes de canicule ne relèvent pas uniquement du bon sens ou de la courtoisie managériale : ils activent des obligations légales précises. Les conseillers RH et experts-comptables ont un rôle d’alerte, d’appui et de documentation essentiel pour garantir que la prévention des risques thermiques soit traitée avec sérieux et méthode.


Références légales

  • Arrêté royal du 4 août 1996 relatif à la protection des travailleurs contre les ambiances thermiques (M.B. 5 septembre 1996).
  • Code du bien-être au travail, Livre V, Titre 1er.
  • SPF Emploi – Direction générale Humanisation du travail, thème Ambiances thermiques : www.emploi.belgique.be

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