O.E.C.C.B.B. – La chronique hebdomadaire de Thierry Litannie
Votre ordre préféré pense à vous. Chaque semaine, vous aurez désormais droit en exclusivité à une petite chronique centrée sur l’actualité et le contentieux fiscal. Une manière agréable et didactique de démarrer la semaine, de s’informer et d’informer vos clients si vous le souhaitez. Elle n’est pas belle, la vie …
Thierry Litannie, Administrateur de l'OECCBB - Avocat Fiscaliste (Partner Andersen in Belgium)
Contexte et effets concrets
À partir de la déclaration d’impôt 2026 (portant donc sur les revenus de 2025), les intérêts d’emprunts relatifs à des biens immobiliers loués ou à des résidences secondaires ne seront plus déductibles pour les personnes physiques.
Cela concerne tous les prêts, anciens comme nouveaux. Environ 475 000 contribuables seront concernés.
L’impact financier pour ces contribuables sera l’ imposition aux taux progressifs par tranches sur le revenu cadastral indexé majoré (x1,40) pour les locations d’immeubles purement privés et sur le montant net du loyer et des avantages locatifs pour les immeubles professionnels, sans possibilité de déduction des intérêts pour neutraliser totalement ou partiellement cette base d’imposition.
Cette mesure vise à générer 210 millions € de recettes par an dans le cadre d’un plan de redressement budgétaire.
Pour nombre de propriétaires et surtout pour les multipropriétaires, l’impact concret de cette mesure sera catastrophique, puisqu’elle génèrera des bases d’impositions souvent importantes, surtout pour les multipropriétaires ayant investi en immobilier locatif, fortement endettés et bénéficiant déjà de revenus professionnels importants. En effet, dans cette hypothèse, cette nouvelle base d’imposition subira une taxation de 50 % majorée des additionnels communaux.
Les loyers perçus par ces contribuables seront dès lors insuffisants pour leur permettre de rembourser leurs emprunts,
La première option peut être de revendre une partie du patrimoine de manière à réduire l’endettement.
La seconde est d’investir via une société ou de lui céder le patrimoine existant: dans cette hypothèse, les intérêts restent déductibles, les amortissements possibles, et les reventes futures pourront bénéficier de la taxation étalée des plus-values moyennant remploi. Une option mixte est de ne céder que l’usufruit des immeubles existants. Elle combine les avantages de la société et la possibilité de redevenir plein propriétaire des immeubles en fin de montage.
Une autre solution est de répercuter le coût fiscal supplémentaire via le loyer: elle est possible mais ne pourra concerner que les nouveaux baux et est risquée en raison des tensions locatives qu’elle ne pourra que générer.
Il est permis de se demander si nos gouvernants ont réellement bien réfléchi à l’impact macroéconomique de cette nouvelle mesure.
Tout d’abord, elle concerne tous les emprunts existants, ce qui est, comme l’a très justement relevé le Conseil d’Etat dans son avis sur le projet, contestable au regard du principe de prévisibilité de la loi fiscale.
Ensuite, elle est de nature à remettre en question l’opportunité même de l’investissement en immobilier locatif pour les personnes physiques.
Une majoration de la base imposable diminue forcément leur rentabilité et donc leur opportunité.
Nombre de contribuables y réfléchiront dès lors à deux fois avant de se lancer dans ce type d’investissements.
Rappelons que s’il s’agit de location privées, il est interdit de faire payer le précompte immobilier au locataire. Ajoutons à cela le risque de chômage locatif et les coûts liés à la transition énergétiques, et vous avouerez qu’il faudra être sérieusement motivé pour se lancer.
En d’autres termes, encore une économie budgétaire qui pourrait en définitive coûter fort cher à l’économie du pays.
Quoi qu’il en soit, voici une merveilleuse opportunité pour les experts comptables de mettre en oeuvre leurs compétences en matière de conseil en proposant à leurs clients une analyse prospective de leur situation et des solutions adaptées et innovantes d’optimisation qui pourront concilier brique dans le ventre et optimisation fiscale et patrimoniale.