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Vers une transparence obligatoire des salaires: une nouvelle donne sociale à anticiper

En 2026, la Belgique devra avoir transposé la directive européenne 2023/970 sur la transparence des rémunérations. À l’heure actuelle, le compte à rebours a commencé : les grandes entreprises (150 travailleurs et plus) devront publier leur premier rapport pour l’année 2026 dès 2027.

C’est donc maintenant qu’il faut agir, y compris pour les plus petites structures qui seront concernées dans un second temps.

Cet article est publié dans le cadre de l'émission du "Social TV Show", le rendez-vous de l'actualité sociale à ne pas manquer chaque trimestre pour être mieux informé suer les enjeux de l'employeurs et de ses équipes!


Une directive au service de l’égalité

Avec cette directive, l’Union européenne entend lutter plus fermement contre l’écart salarial entre les sexes. Aujourd’hui encore, les hommes gagnent en moyenne 12% de plus que les femmes en Europe. En Belgique, cet écart est tombé à 5%, mais il reste un enjeu de société. La transparence est vue comme un outil structurel pour garantir l’égalité de traitement et d’opportunité.

Trois piliers d’obligations nouvelles

La directive repose sur trois piliers essentiels :

Accès renforcé à l’information

Les entreprises devront publier la rémunération ou la fourchette salariale dès l’offre d’emploi. Elles ne pourront plus interroger les candidats sur leur rémunération passée. Par ailleurs, les salariés pourront demander des informations sur les salaires moyens pour des postes équivalents et sur les critères d’évolution.

Obligations de communication structurée

Les employeurs seront tenus de publier des rapports détaillés sur leur politique salariale et les écarts constatés. En cas d’écart supérieur à 5% non objectivement justifié, une évaluation conjointe avec les partenaires sociaux devra être menée.

Sanctions et réparations

Les employeurs devront indemniser les victimes de discriminations salariales par le versement d’arriérés et autres compensations. Ces réparations devront couvrir la totalité du préjudice, y compris les éléments non pécuniaires.

Des changements profonds à anticiper dans les RH

Pour les départements RH, la directive implique une transformation du fonctionnement :

  • Élaboration ou mise à jour de grilles salariales transparentes, fondées sur des critères objectifs ;
  • Développement de réponses standardisées aux demandes individuelles des salariés concernant leur position salariale ;
  • Implication formelle des partenaires sociaux dans la politique de rémunération et les mesures correctrices.

En clair : la directive transforme un tabou – le salaire – en un sujet organisationnel structuré, mesurable et partageable.

Cinq bénéfices pour les employeurs qui s’y engagent

Corriger les écarts involontaires

Les biais inconscients (sexe, origine, posture…) peuvent être détectés et corrigés, améliorant ainsi l’équité interne.

Renforcer l’image employeur

Une politique salariale équitable et transparente renforce la réputation éthique, sociale et durable de l’entreprise.

Accroître la motivation des équipes

La clarté sur les règles de progression salariale agit comme un levier de reconnaissance et d’engagement.

Faciliter les négociations salariales

La transparence réduit les tensions et favorise une culture du dialogue basée sur des critères clairs.

Encourager la confiance et la coopération

L’équité perçue renforce la cohésion interne et diminue les conflits latents ou les perceptions d’injustice.

Des défis à ne pas sous-estimer

Mais la directive ne sera pas sans conséquences :

  • Complexité administrative pour les PME ;
  • Risques juridiques accrus en cas d’écarts inexpliqués ;
  • Tensions internes si les écarts non fondés sont exposés sans accompagnement managérial.

Plus globalement, ne rien faire expose à :

  • Des ruptures sociales internes ;
  • Une perte de compétitivité en matière de marque employeur ;
  • Une érosion du lien de confiance dans l’entreprise.


Que faire dès aujourd’hui ?

Les entreprises ont tout à gagner à anticiper la transposition de la directive, au lieu de l’attendre

  • Réalisez un audit interne des rémunérations pour objectiver la situation actuelle ;
  • Élaborez une politique salariale claire, documentée et cohérente avec vos valeurs et vos priorités RH ;
  • Mettez en place un processus de communication et d’explication accessible à tous ;
  • Formez vos équipes RH et managers à ces enjeux nouveaux.

Conseil stratégique : tout commence par une introspection managériale. À quelles fonctions accordons-nous le plus de valeur ? Quels critères justifient les écarts ? Quelle posture voulons-nous incarner sur le marché du travail ?


Conclusion

Loin d’être une contrainte, la directive sur la transparence des rémunérations peut devenir un catalyseur d’équité, de performance collective et d’image responsable. À condition de s’y préparer sérieusement et sans attendre. Car, en matière de rémunération comme ailleurs, la transparence bien accompagnée est souvent synonyme de confiance retrouvée.

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