
La presse est saturée des états d’âme des uns et des autres, des petites phrases qui – à mon grand étonnement – étonnent encore, des atmosphères de crises destinées à tenir un pays en haleine, des démissions et arrivées des uns et des autres, des abus et népotismes vite oubliés, des microscandales et autres faits divers d’une importance secondaire.
Tout cela masque les véritables problèmes de la Belgique, pays artificiel qui a dû s’inventer une complexité intérieure pour dissimuler son manque de réalité géographique ou historique et dont la croissance est le passager clandestin de ses partenaires économiques.
Au reste, si nous étions une île, nos réalités politiques nous auraient probablement réduits aux constats de l’île de Pâques, c’est-à-dire un ensemble de statues entourées d’une population dévastée.
Car les vrais problèmes, ce sont d’abord les réalités de 25% des Belges : la pauvreté et la précarité. Les entend-t-on ? Non : ce n’est pas une cause médiatique porteuse. C’est aussi le phénomène de désindustrialisation à bas bruit qui effrite l’Europe et donc la Belgique. C’est, pour les prochaines années, l’avenir des soins de santé et de l’enseignement dont les réalités et les contraintes vont être explosées (et je pèse mes mots, étant enseignant) par l’intelligence artificielle. C’est aussi le mal-être, parfois violent, de communautés et de populations qui ne se trouvent pas dans un projet d’avenir puisque celui-ci n’est pas formulé. C’est aussi l’écologie, problème pourtant criant dans un pays qui a un des pires taux d’utilisation de la planète.
On me rétorquera que c’est ainsi depuis deux siècles.
Je n’en suis pas certain.
La Belgique fut le cœur et la forge de la révolution industrielle et réussit à tenir son rang, désormais dilué au sein d'agglomérats européens. Nous avons eu de grandes femmes et hommes d’état, auxquels notre Premier ministre appartiendra peut-être (et je lui souhaite).
Et c’est peut-être parce que nous n’avons même plus notre monnaie à défendre que nous nous retrouvons à lire les pirouettes de certains responsables politiques, heureux d’avoir, ne fût-ce qu’un instant, égayé les chaumières.
Mais franchement, je ris moins d'année en année.